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une singularité toute spéciale aux gens timides : il prenait un biais pour exprimer certaines choses qu’il n’osait dire à sa cousine directement, et il les lançait volontiers dans une conversation avec un indifférent, pourvu que Gertrude fût à portée de les entendre. Il avait besoin que quelqu’un lui donnât la réplique, et par un malencontreux hasard, ce quelqu’un fut la grande Héloïse.

La première ouvrière avait un air bon enfant et un bavardage familier qui mettaient les gens à l’aise. La sauvagerie du jeune homme l’avait intriguée ; elle le trouvait beau garçon, bien qu’un peu trop mélancolique et ténébreux, et elle résolut de l’apprivoiser. Xavier fut presque heureux de ce secours inattendu, et sans songer à mal, accueillit courtoisement les prévenances de la modiste. Il plaisantait volontiers avec elle ; la bonne humeur d’Héloïse le mettait en verve, il devenait expansif et hasardait tout haut des demi-confidences destinées à Gertrude. Héloïse, qui était peu fine, ne se doutait guère du manège ; elle écoutait Xavier bouche béante, sans trop comprendre le plus souvent. Elle voyait la réserve de Gertrude et ne se l’expliquait pas. Sans se mettre martel en tête pour en chercher la cause, elle trouva beaucoup plus