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ton âge, avec mon paquet sur le dos… J’allais à B…, comme toi… Eh ! eh ! il y a eu de cela quarante-deux ans à la Chandeleur dernière…

Il poussa un soupir, croisa ses longs doigts sur ses jambes et se mit à regarder le foyer à demi éteint où scintillaient parfois encore quelques points lumineux. Cette allusion à sa jeunesse l’avait rendu songeur ; il resta longtemps silencieux. Gertrude embarrassée ne savait si elle devait s’en aller. A un mouvement qu’elle fit pour quitter sa chaise, M. Renaudin releva la tête.

— Quoi ! tu veux déjà partir, s’écria-t-il… Attends encore un peu, je n’ai pas tout dit.

Il contempla un moment la jolie figure étonnée et attentive de sa nièce ; on eût dit que ses regards se rafraîchissaient en se reposant sur ces cheveux soyeux, sur ces yeux limpides et rêveurs, sur cette petite bouche souriante… Il se leva péniblement et effleura de sa main ridée et tremblante les bandeaux crêpelés de Gertrude.

— Comme tu as de beaux cheveux blonds ! soupira-t-il. Va, rassieds-toi encore un peu ; mes yeux ne sont pas souvent réjouis par la vue de la jeunesse… Arrête-toi un peu ici. Qui sait quand nous nous reverrons ?