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les arbres ne disait rien de joyeux ni de consolant. C’était tantôt la complainte des souvenirs à jamais ensevelis, et tantôt la dure voix de la réalité parlant d’une lutte sans fin et d’un morne avenir. Mais Véronique sentait bien vite tout ce que cette mélancolie avait d’affaiblissant ; elle fermait brusquement la fenêtre, allumait sa lampe et brodait parfois jusqu’à minuit, tandis que la voix du ruisseau, grossie par le contraste du silence environnant, montait jusqu’à elle, bruyante et grondeuse… Vers minuit, la lampe jetait une lueur plus faible, les yeux rougis de Véronique étaient pleins de picotements, et elle se couchait en rêvant à Gérard.

Dès les premiers jours de son installation au Four-aux-Moines, elle avait écrit à son oncle pour lui apprendre sa résolution bien arrêtée et le prier de lui faire parvenir les arrérages de son modique revenu. La réponse ne se fit pas trop attendre. Elle arriva un matin que la jeune femme assistait au déjeuner de M. du Tremble. La lettre était écrite par madame Obligitte, dans ce style acide et blessant qui est propre aux dévotes en colère. Véronique la parcourut rapidement, sentit les larmes lui monter aux yeux et la posa sur la table.

— Peut-on voir ? demanda le verrier, qui