Page:Theuriet - Gertrude et Véronique, 1888, 4e mille.djvu/310

Cette page n’a pas encore été corrigée

suis qu’un campagnard, mais je n’en ai pas moins là-dessus ma petite façon de penser ; permettez-moi de vous la dire tout franc… Une femme séparée, encore toute jeunette et appétissante, c’est, selon le dicton de chez nous, « le gibier du diable ; » tout chacun la suit de l’œil, et plus d’un serre d’avance dans sa poche la pierre qu’il espère lui jeter un jour… Jusqu’ici la maison de votre oncle a été votre sauvegarde, mais si vous en sortez, eh bien ! dame, on clabaudera, on dira qu’il fallait au moins vous réfugier près de votre mari malade… On oubliera ses torts, à lui, pour vous en donner, à vous ; d’aucuns vous accuseront de n’être partie que pour vous débarrasser d’une charge gênante ; d’autres chercheront la raison de ce départ inattendu, et ne manqueront pas d’inventer des menteries à votre désavantage.

— Peu m’importent les commérages du pays, repartit Véronique, — mais, au ton déjà moins ferme de sa réponse, on sentait qu’elle était ébranlée.— Cornefer pensa que le coup avait porté, et quand elle ajouta : — J’ai ma conscience pour moi ; — il s’enhardit jusqu’à répondre en hochant la tête : — Hé ! hé !… En êtes-vous bien sûre ?

Cette fois il s’aperçut bien vite qu’il avait