Page:Theuriet - Gertrude et Véronique, 1888, 4e mille.djvu/305

Cette page n’a pas encore été corrigée

son cœur était trop plein de dégoût, et sa patience était épuisée… S’était-elle trompée, et l’opinion du monde avait-elle raison ? Cette liberté laissée par la loi n’était-elle qu’un leurre ou un danger de plus ? Depuis son départ de Bronnenthal, sa vie n’avait-elle pas été un perpétuel combat ?…

C’était dans le salon de sa tante, deux jours après l’entrevue de Gérard et du verrier du Four-aux-Moines, qu’elle se posait ces terribles questions et qu’elle remuait ces douloureux souvenirs. Par moments, elle se sentait horriblement lasse et découragée.— Elle alla s’asseoir près de la fenêtre et regarda la campagne ; les vigoureuses végétations du mois de mai s’élançaient partout en jets hardis, en frondaisons épaisses. Les traces de l’orage qui les avait un moment couchées à terre n’étaient déjà plus visibles ; dans la pleine lumière du printemps, toutes les forces vives de la nature accomplissaient joyeusement leur œuvre féconde et réparatrice…

— Et moi aussi, pensa Véronique en relevant la tête, je lutterai et je triompherai.

Au même moment la servante entra et annonça à la jeune femme qu’un homme d’affaires demandait à lui parler. En effet, à peine la domestique