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d’un orage. Il hâta le pas, et dans sa précipitation, se trompa de sentier, de sorte qu’au bout, de quelques minutes il fut obligé de rebrousser chemin, et se trouva bientôt complètement désorienté. Sous les hautes branches de la futaie l’obscurité devenait très épaisse ; de temps en temps, Gérard se heurtait proche au tronc d’un hêtre ou trébuchait dans un buisson de houx. Il commençait à désespérer de se tirer d’affaire, quand il entendit un bruit de sonnettes, et distingua à travers les arbres les formes vagues d’un convoi de mulets se suivant à la file.— Enfin, murmura-t-il avec un soupir de soulagement, voici des brioleurs !

Dans ces bois privés de chemins d’exploitation les charrois se font presque partout à l’aide de bêtes de somme ; de là l’industrie des brioleurs qui transportent à dos de mulets tous les produits forestiers. Sous leurs lourdes charges, les mulets gravissent, sans broncher, les sentiers les plus escarpés, et ils connaissent si bien les moindres passes, que leurs conducteurs les laissent revenir seuls au village. Ceux qui traversaient en ce moment la réserve de La Chalade n’avaient pas de guide, mais Gérard n’hésita pas à les suivre, sûr d’éviter ainsi les fondrières et de trouver à la fin un gîte pour la nuit. A l’approche