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et les trois filles buvaient de la piquette. Tous avaient bon appétit, à l’exception de Gertrude, qui se forçait pour avaler une bouchée, et qui semblait absorbée par ses réflexions. Gaspard, le dos au feu et son chien Phanor entre les jambes, mangeait comme quatre, buvait d’autant et semblait rasséréné par le rayonnement de l’âtre qui lui chauffait les reins, et les rasades de vin qui lui égayaient le cerveau ; son verbe tranchant s’était adouci, et parfois un large éclat de rire entrecoupait ses propos de chasseur. La conversation roulait le plus souvent sur les souvenirs du temps passé et sur les familles de verriers avec lesquelles les Mauprié entretenaient des relations de voisinage. Au dessert, Gaspard, mis complètement en bonne humeur, fredonna un air de chasse et conta ses exploits de la journée. Il était tard quand on se leva de table ; Honorine et Gertrude enlevèrent le couvert et chacun s’apprêta à gagner son dortoir. Les trois jeunes filles allèrent embrasser madame de Mauprié ; Gaspard baisa bruyamment les joues de ses sœurs, puis s’avança vers Gertrude.

— Allons, petite cousine, dit-il en lui tendant la main, pas de bouderie !… Faisons la paix !