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Le même soir, Véronique, après cette visite, se promenait au jardin. C’était la première soirée de mai, et sa tante, avec Adeline, s’était rendue pieusement à l’église où l’on célébrait l’ouverture du Mois de Marie.— Elle errait seule le long des sentiers herbeux du verger abandonné ; elle se disait que la lutte dont elle venait de sortir victorieuse recommencerait le lendemain, et elle se demandait si elle aurait toujours la même force et le même succès.— Comme pour affaiblir encore son courage, le printemps, alors dans son plein épanouissement, lui envoyait toutes ses tièdes haleines de fleurs demi-closes et de bourgeons entr’ouverts ; les vieux pommiers moussus secouaient sur sa tête leur neige odorante, et la jeune lune, qui dressait au-dessus des toits aigus son mince croissant, mettait une tendre et féerique lumière dans la verdure des massifs. Au bas de la terrasse, vers le faubourg, on entendait des rumeurs et des chants lointains… Le jour du 1er mai, dans les villages de l’Argonne, les jeunes garçons vont de porte en porte, des branches vertes à la main, chanter le Mai demander de l’argent ou des œufs. Les chansons des Trimazeaux (c’est le nom qu’on donne aux quêteurs) bourdonnaient dans l’éloignement, et ajoutaient un élément de