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— Vous pensez qu’il vous aime ? demanda encore Véronique.

Pour toute réponse, Adeline sourit de nouveau d’un air demi-ironique et demi-mystérieux, puis elle haussa les épaules, et se replaçant devant la glace, souleva ses jolis bras et se mit à renouer ses cheveux… La tête un peu rejetée eu arrière, les lèvres rieuses, le nez au vent et la poitrine doucement soulevée, elle jetait tantôt à la glace et tantôt à sa cousine de petits coups d’œil interrogateurs. Sa jeune et victorieuse beauté semblait dire : — Peut-on ne pas m’aimer ?

Au sortir de cet entretien, Véronique sentit une sourde et douloureuse irritation. Elle était froissée de ce ton de superbe indifférence, et les paroles d’Adeline retentissaient en elle comme un défi dédaigneux. D’où venait cette amertume étrange ? Le penchant affectueux qu’elle avait pour Gérard était-il assez puissant déjà pour la faire souffrir à l’idée seule d’un partage possible avec Adeline ? La simple affection avait-elle de ces violentes jalousies, et un pareil sentiment pouvait-il s’appeler encore de l’amitié ?… Non, c’était de l’amour ! — Cette pensée éclata comme un terrible éclair, et illumina tout à coup son cœur d’une clarté cruelle.— Elle se trouvait alors