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lumineux pénétrait avec lui, et tous les objets assoupis dans l’ombre semblaient sortir d’un long sommeil, comme les habitants du château de la Belle-au-Bois-Dormant à l’arrivée du fils du roi. Le plus souvent Gérard se trouvait seul avec les deux cousines ; M. Obligitte était en forêt, et madame Obligitte s’occupait de son ménage ou de l’église. On faisait alors un peu de musique ; Gérard chantait et Adeline l’accompagnait, puis Véronique à son tour s’asseyait au piano et jouait une sonate de Mozart ou une romance de Mendelssohn. D’ordinaire, elle se mêlait peu à la conversation. A demi cachée derrière le piano, elle laissait parler les deux jeunes gens, et s’oubliait à observer la nature expansive du fiancé d’Adeline. Elle aimait sa voix sympathique et son enthousiasme. Il lui semblait que Gérard apportait avec lui dans la vieille maison les saines et vivifiantes émanations des bois qu’il venait de traverser. Elle trouvait dans toute sa personne quelque chose de la franchise et de la spontanéité des plantes forestières, une verdeur agreste tempérée par une fleur de délicatesse féminine. Elle se sentait réjouie par le loyal sourire de ses lèvres vermeilles, toutes gonflées du riche sang de la jeunesse ; et quand, au milieu de l’entretien, le