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Obligitte rappelait à madame La Faucherie sa conversation avec M. de Vendières et les indications données par son voisin de campagne. Cette singulière coïncidence la frappa et ramena plus fortement encore son esprit vers sa préoccupation dominante. Elle avait toujours rêvé de choisir elle-même la jeune fille digne de comprendre et d’aimer Gérard, de frayer elle-même le chemin où les deux jeunes gens pourraient se rencontrer, d’y amener en secret cette fiancée élue entre toutes, charmante entre toutes, et de dire à son fils : — Voici le bonheur, prends-le de ma main. Après avoir consacré à Gérard les belles années de sa seconde jeunesse, et reporté sur la tête de l’unique enfant toutes les tendresses de son cœur, elle voulait faire plus encore, et lui donner le bonheur dans l’amour d’une autre.— Elle voulait trop, car l’amour est un oiseau capricieux qui ne chante qu’à son heure, et ne fait son nid que sur un arbre de son choix.— Elle l’avait su jadis et elle aurait dû s’en souvenir, mais les préoccupations un peu exclusives de la mère avaient effacé les souvenirs de la jeune fille. A cinquante ans, on oublie qu’on voulait aimer et choisir soi-même, quand on en avait vingt. En dépit de sa belle âme, madame La Faucherie était