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la neige s’était fondue dans les prés ; un doux vent avait balayé les nuages, et le ciel était bleu par places. Au bord des haies, les chatons des noisetiers commençaient à jaunir, et les fleurs des cornouillers ouvraient leurs étamines d’or aux nœuds des branches nues. Une après-midi, le vent du sud envoyait de si caressantes brises, que Xavier entre-bâilla les vitres du châssis, et par cette ouverture les rayons du soleil envahirent l’atelier. Xavier, rêveur, avait déposé son maillet et son ciseau, et s’accoudant à l’établi, il s’était mis à songer au temps passé, — à la soirée où il avait dit adieu à Gertrude tandis que les chevaux piaffaient devant l’auberge des Islettes, — à la journée d’été où il avait déclaré son amour sous la tonnelle des demoiselles Pêche… Il repassait avec mélancolie tous ces souvenirs si lumineux, il regardait à travers les vitres les nuages blancs fuir sur le bleu du ciel, et il se demandait si ce n’était point là l’image de son bonheur évanoui, quand tout à coup le loquet s’agita, la porte de l’atelier s’ouvrit timidement, et une svelte figure de jeune fille apparut dans un rayon de soleil.

— Gertrude ! s’écria Xavier.

C’était elle en effet, enveloppée dans une longue mante de drap noir ; elle était encore pâle,