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pas encore bien aujourd’hui. Je suppose qu’un comité d’émigration, établi à Paris, dirigeait les fugitifs, au fur et à mesure, vers les provinces où ils avaient chance de trouver aide et assistance de la part de quelques familles royalistes. Le fait est que Villotte en eut cinq pour sa part, et ce ne fut pas un mince événement dans cette ville casanière que l’arrivée de ces étrangers à la figure basanée, coiffés du grand chapeau de Basile, vêtus de soutanes en loques, et s’exprimant dans une langue que personne ne comprenait. Les vieux légitimistes de l’endroit et quelques familles dévotes de la bourgeoisie se firent un point d’honneur de donner à ces proscrits le vivre et le couvert. Il advint ainsi que l’un d’eux fut logé chez de pieuses filles, nos voisines, couturières de leur métier et doyennes de la congrégation du Rosaire. Dès le lendemain de l’installation du prêtre espagnol, je me faufilai dans la cour des couturières, et, avec l’impudent aplomb d’un gamin, indiscret comme une mouche, j’eus vite fait la connaissance de don Palomino Palacios.

C’était un homme d’une cinquantaine d’années, brun, vif, trapu et carré des épaules. Ses