— Parlons d’autre chose, reprit Yvert ; je suis chargé d’une commission pour toi de la part d’une brave fille que tu as connue au Val-Serveux, et qui ne t’oublie pas.
— Norine ? demanda tout bas Bigarreau, dont l’œil vitreux s’était soudain rallumé… Vous l’avez vue ?
— Oui, repartit le forestier en tirant de sa poche les bruyères roses ; voici des fleurs qu’elle a cueillies pour toi à la Fontenelle… et elle t’embrasse.
Bigarreau saisit le bouquet, le porta à ses lèvres et à ses narines, comme pour y respirer quelque chose du baiser de Norine et de l’odeur des bois, puis ses yeux se mouillèrent.
— Chère fille !… Il y a encore de bonnes gens au monde, m’sieu Yvert, et si j’étais resté près d’elle, là-bas, j’aurais pu comme un autre devenir un honnête homme… Je commençais déjà à changer de peau, mais le gardien-chef m’est tombé dessus, et.. fini le bon temps ! Je ne verrai plus Norine, mais je vous demande en grâce, m’sieu Yvert, de lui porter aussi un souvenir venant de moi… Passez-moi ma veste, là, au pied du lit…