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en sifflotant il gravit la tranchée qui coupait la forêt dans la direction de la grand’route. Le bruit de ses souliers ferrés et la cadence de son sifflet s’éteignirent peu à peu sous les arbres, et la combe reprit sa physionomie silencieuse et solitaire…

Le Champenois reparut à l’heure du souper et conta qu’il était allé à Colmiers, chez le maréchal ferrant, auquel il avait donné un outil à réparer. Il semblait plus loquace et de plus joyeuse humeur que d’habitude, et le père Vincart prétendit qu’il avait dû pousser jusqu’au bouchon du cabaretier. Norine et Bigarreau, encore tout émus de l’éclosion si brusque de leur amour, et tout occupés de savourer leurs souvenirs, prenaient peu de part à la conversation. Le souper ne traîna pas longtemps et on alla se coucher.

Le lendemain matin, le soleil se leva rutilant dans un ciel d’été très pur. L’ouvrage pressait dans le chantier, et on se mit de bonne heure à la besogne. Le père Vincart et le Champenois, penchés sur leur billot, évidaient à la cuiller les sabots déjà ébauchés, et les passaient à Norine, qui les finissait à l’aide du paroir.