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loin, là-bas, vers l’Est, au-delà des pleines et des collines crayeuses de la Champagne, jusqu’à une vallée adossée à une grande forêt, avec une modeste rivière qui roule son eau jaune entre des files de peupliers, au pied d’une vieille petite ville aux toits de tuiles brunes…

C’est là qu’il a vécu enfant, c’est là qu’il revenait chaque année aux vacances. Son père, greffier de la justice de paix, y menait la vie étroite et serrée des petits bourgeois sans fortune. Élevé à la dure, accoutumé de bonne heure au devoir strict et au travail acharné, Hubert a quitté le pays à vingt ans et n’y est plus guère retourné que pour suivre le convoi de son père. Doué d’une intelligence supérieure et d’une volonté de fer, enragé travailleur, il a monté rapidement les degrés de l’échelle administrative. Être sous-directeur à trente-huit ans, cela passe dans le monde des bureaux pour un avancement exceptionnel. Austère, ponctuel, réservé et poli, à cheval sur les règlements, il arrive au ministère à dix heures, n’en sort qu’à six et emporte du travail chez lui. D’une nature peu expansive bien que sensible au fond, il passe pour être très boutonné. Il va peu dans le monde et sa vie a