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ciller. Il a entendu tant de suppliques analogues !

— Avez-vous déjà été secourue, madame ? demande-t-il flegmatiquement.

— Non, monsieur, jusqu’à présent j’avais pu vivre sans tendre la main… J’ai une petite pension et…

— Ah ! interrompt-il sèchement, dans ce cas je crains bien que nous ne puissions rien pour vous… Nous avons à soulager beaucoup de personnes malheureuses qui n’ont pas même cette ressource d’une pension.

— Attendez, monsieur ! s’écrie-t-elle désespérément, je n’ai pas tout dit… J’avais trois garçons, ils sont morts ; le dernier donnait des leçons de mathématiques… L’autre hiver, en allant du Panthéon au collège Chaptal, par une pluie battante, il a attrapé un mauvais rhume qui a tourné en fluxion de poitrine et qui l’a emmené en quinze jours… Ses leçons nous faisaient vivre, moi et son enfant, car il m’a laissé une petite-fille. Les frais de maladie et les frais mortuaires m’ont mise à sec. J’ai engagé mon titre de pension pour payer des dettes criardes… Me voilà seule au monde avec la petiote, sans un