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choisissant de l’œil parmi les arbres de bordure un alisier au fût élancé et à la cime feuillue, il y grimpa en deux temps, comme un écureuil.

Perché à chevauchons à la fourche des hautes branches, dissimulé au plus épais de la feuillée, il tira alors ses cigarettes, en alluma une et savoura lentement les délices du fruit défendu. On était bien, là-haut, dans la verdure et la fraîcheur ! On apercevait entre les branches les toitures du village, les miroitements de l’Aube dans la prairie, puis, sur les deux versants de la vallée, les frissons des champs de seigle et d’avoine, alternant avec les bigarrures des sainfoins et des trèfles incarnats. Les merles sifflaient dans le taillis, les fauvettes des roseaux bavardaient dans les saules de la rivière, et un vent frais vous berçait comme dans un hamac. On y était si bien, que Bigarreau s’y oublia. Quand Seurrot revint en mâchonnant une rose entre ses dents et qu’il passa en revue sa petite troupe, il s’aperçut du premier coup que l’un des détenus manquait à l’appel.

— Où est le numéro vingt-quatre ? s’écria-t-il.

Les gamins échangèrent un regard sournois