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avait l’air bon et spirituel. Son bonnet lorrain, dont les longs tuyaux entouraient d’une auréole de tulle sa figure éveillée, laissait à découvert un front bombé et deux doigts de cheveux blancs, crépus, rejetés en arrière à la chinoise. Elle était toujours proprement vêtue d’une robe de laine, dans le corsage croisé de laquelle s’enfonçaient les pointes d’un fichu de limon, et dont les manches à gigot bouffaient autour des bras amaigris. Cette toilette surannée, ces meubles contemporains de Louis XVI, mettaient autour d’elle une atmosphère du temps passé. Toute sa personne répandait un parfum antique du dix-huitième siècle, comme ces éventails de merisier qui exhalent après de longues années la bonne odeur du bois dans lequel leurs branches ont été taillées. Elle ne s’était jamais mariée, et je m’étonnais toujours qu’elle fût restée fille, tandis que, dans sa famille, ses sœurs et ses cousines, malgré leur humeur acariâtre et chagrine, avaient toutes trouvé un mari.

De la chambre de mademoiselle Sophie, un escalier conduisait au grenier, qui occupait tout le premier étage et dont elle avait fait son fruitier et son garde-meuble. Ce grenier était un