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du maître. Elle était tête nue, et ses abondants cheveux noirs frisottants faisaient mieux ressortir encore l’éclat de ses yeux d’un bleu sombre, la rougeur de ses lèvres pulpeuses. Jean lui dit qu’elle était jolie, et elle sourit ; il ajouta qu’il l’adorait, et elle sourit encore en savourant comme du miel les douceurs que le jeune maître lui balbutiait à l’oreille. Il la prit dans ses bras, elle frissonna d’aise en se serrant contre sa poitrine et elle y resta, levant vers lui des yeux humides et reconnaissants, tandis qu’il la baisait à pleines lèvres…

Et c’est ainsi, selon le dicton du pays, que le grillon d’amour chanta au foyer de Morgrève. Marie-Ange trouvait le jeune homme à son gré, elle était fière d’avoir été distinguée par lui, elle l’aima avec ferveur, sans remords, sans arrière-pensée. Elle était tendre, passionnée, naïvement sensuelle, et elle lui donna du bonheur sans compter. Jean, qui n’avait pas été gâté sous ce rapport, goûta pleinement à toutes les délices de l’amour partagé. — Il y a des natures qui semblent créées tout spécialement pour comprendre et pratiquer l’amour ; elles en savent par intuition et prescience toutes les mignardises et tous