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laissant tout ébaubi, tandis qu’elle disparaissait dans les ténèbres d’un carrefour.

Je rentrai, la tête en désordre, et montai m’enfermer dans ma chambre, où je ne m’endormis que fort avant dans la nuit, d’un sommeil fiévreux. Le lendemain je m’éveillai très tard aux détonations des boîtes d’artillerie et des pétards qui annonçaient la résurrection de Notre-Seigneur. En même temps, les cloches de la cathédrale se mirent à sonner en volée, d’autres carillons s’éveillèrent tour à tour dans chacune des églises et bientôt tout Séville retentit de tintements sonores. Ô la musique des cloches de mon pays, la délicieuse musique que je n’entendrai plus !…

Pendant toute la matinée, je me promenai dans ma chambre, en me disant que je n’irais pas à l’Alcazar ; quand je descendis pour le repas du midi, j’étais si pâle, que Manuelita s’informa d’une voix inquiète si j’étais malade. Ce fut à peine si je lui répondis, et, le dîner achevé, je m’empressai de sortir. J’errai à travers les rues pleines de tapage et de soleil, j’entrai dans la cathédrale afin d’essayer de m’y recueillir : — Non, non, me répétais-je, je n’irai pas à