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La danseuse et son danseur, battant des pieds et faisant claquer leurs doigts, se balançaient en face l’un de l’autre, se regardaient, se poursuivaient avec des tortillements serpentins ; parfois, l’un des accompagnateurs lançait d’une voix gutturale un couplet de ces vieilles chansons que le peuple nomme des peteneras :


Una mujé fué la causa
De mi perdision primera ;
No hay perdision en er mundo,
Niña de mi corason !…
No hay perdision en er mundo,
Que por mujeres no benga[1].


Parfois aussi les chanteurs, et le public lui-même lançaient au couple dansant de rauques paroles d’encouragement : Ole, ole ! Muerte ! Alma ! alma ! Et la danseuse, grisée par les excitations, redoublait ses trépignements et ses torsions couleuvrines, tandis que sa face brune restait impassible et souriante. — Malgré les applaudissements de la foule, je n’éprouvais aucun enthousiasme ; cette danse étrange et las-

  1. Une femme fut la cause — Première de ma perte. — Il n’y a pas de perdition au monde, — Fillette de mon cœur ! — Il n’y a pas de perdition au monde — Qui ne vienne des femmes.