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J’étais alors un bambin à l’imagination précocement éveillée et à l’âme crédule. Bien que je touchasse à ma neuvième année, on ne m’avait pas envoyé au collège. Un professeur, nommé M. Berloquin, homme grave et pieux, à la tournure de sacristain, à la face de bouledogue, venait chaque jour pendant deux heures m’enseigner le français, les déclinaisons et conjugaisons latines, l’histoire sainte et les quatre règles. Peu surveillé, quand j’avais griffonné mes devoirs, j’étais absolument maître de mon temps et je l’employais à dévorer les livres laissés à ma disposition : le Magasin des Fées, les Mille et une Nuits, et des romans de chevalerie. N’ayant pas de camarades de mon âge, je vivais le plus souvent face à face avec moi-même, mais je peuplais ma solitude avec les aventures chimériques que me suggéraient mes lectures. Deux ou trois fois on m’avait conduit au théâtre de ma petite ville, les jours où on y représentait des féeries ; le jeu merveilleux des