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celui-ci rencontra Tchin-Tong et Tsang-Pa : « Notre maître, leur dit-il[1], est indigné de ce que vous ne marchez pas bravement en avant ; il arrive en personne pour vous châtier !.... — L’ennemi avait trop de monde, répliqua Kong, nous n’avons pas dû livrer un combat téméraire. Ce passage, nous le gardons de notre mieux ; notre maître ferait bien maintenant d’aller protéger la ville de Siao-Pey. »

Tchin-Teng monta sur les remparts qui fermaient le passage ; l’ayant vu entouré par les troupes impériales établies tout auprès, quand la nuit fut venue, il écrivit trois lettres qu’il attacha à une flèche et lança ainsi dans le camp de Tsao[2]. Le lendemain, comme il allait se retirer, Kong lui dit : « Notre maître n’a point à craindre pour ce passage ; il peut, en toute sûreté, retourner à Siao-Pey et défendre cette ville. »

Au grand galop, Teng revint auprès de Liu-Pou et lui murmura à l’oreille : « Seigneur, ceux à qui vous avez confié la garde de cet important défilé, ont l’intention de le livrer à Tsao ; j’ai cru devoir dire à Tchin-Tong d’aller plutôt au chef-lieu ; vous, seigneur, attaquez cette nuit les troupes impériales avec vigueur ! — Sans vous, répliqua Liu-Pou, sans vous, je donnais dans le piège de ces traîtres ! » Et il le dépêcha vers Tchin-Kong, pour dire à celui-ci qu’il eût à allumer un feu, signal convenu auquel Liu-Pou répondrait lui-même en soutenant sa sortie.

Arrivé près du passage, Teng au contraire donna ce faux avis : « Les soldats de Tsao ont pris un chemin détourné ; déjà ils sont dans le défilé ; j’ai peur que le chef-lieu ne tombe au pouvoir de

  1. Il y a dans le texte : Le prince de Ouan, titre honorifique de Liu-Pou. Tchin-Teng, qui était un traître, le désigne ici par son plus beau nom, afin de mieux simuler le zèle et l’obéissance. Ce sont là des nuances que l’auteur chinois fait toujours sentir ; l’embarras que causent les noms propres dans une traduction ne permet pas de les exprimer, si ce n’est en note.
  2. Quand Artabaze assiégeait la ville de Potidée, Timoxène, stratège des Scionéens convint de lui livrer la place.... Toutes les fois que Timoxène et Artabaze voulaient correspondre l’un avec l’autre, ils attachaient la lettre à une flèche et l’entortillaient autour de son entaille, de façon qu’elle lui servit d’ailes ; on tirait ensuite cette flèche dans un endroit convenu. Hérodote, Uranie,§ CXXVIII.