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ordre de combler les douves avec de la terre ; ils l’apportaient dans des sacs, en y jetant pèle mêle des fascines et de l’herbe, et préparaient des échelles pour l’assaut ; enfin, à l’aide d’une tour d’observation, on put voir ce qui se passait dans les murs[1]. Depuis trois jours déjà, Tsao faisait sans cesse à cheval le tour des remparts pour en découvrir l’endroit faible ; il hâtait surtout les préparatifs du siège le long des côtés du nord et de l’ouest. Le général assiégé interrogea son conseiller Hia-Hu ; celui-ci répliqua qu’il devinait les intentions de Tsao, et savait un moyen de le forcer à la retraite.


II[2].


Tchang-Siéou désira connaître le plan qu’il méditait ; Hia-Hu répondit : « Du haut des murs, je vois depuis trois jours Tsao tourner autour de la ville ; il a découvert que sur les côtés de l’est et du sud, nous avons des palissades[3] inégales, vieilles, mal disposées et à moitié pourries. Cette nuit, il va donner l’assaut, et c’est pour détourner notre attention qu’il fait semblant de préparer l’attaque sur un autre point. — En ce cas, que devons-nous faire, demanda Tchang-Siéou ? — Quelque chose de très facile : déguiser en soldats les gens du peuple ; les placer, pour tromper l’ennemi, sur le côté des murailles qu’il feint de menacer, et mettre en embuscade, là où se dirigera véritablement son attaque, de vrais soldats et des meilleurs. Au milieu de la nuit, cette populace travestie en combattants poussera de grands cris, une fois arrivée au lieu convenu ; l’ennemi donnera l’assaut et au

  1. Littéralement : échelle à escalader les nues. D’après le dessin qu’en ont donné les missionnaires, elle ressemble à une échelle de bibliothèque, faite sur des proportions gigantesques ; on employait aussi une espèce de mât garni de barreaux, pour arriver à une hune posée au sommet ; cet appareil portait, comme tous ceux de ce genre, sur quatre ou six roues en bois. Voir Mémoires sur les Chinois, vol. VIII, aux planches, les numéros 47, 50, 52, 140.
  2. Chapitre V, page 79, du texte chinois-mandchou.
  3. En chinois, lo-kio, cornes de cerfs ; ce qui signifie aussi quelquefois chevaux de frise. Voir Mémoires sur les Chinois, vol. VIII, planche XXIV.