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le disposer à la clémence pour échapper au châtiment qui vous menace !… — Mon fils et moi, dit Tchin-Kouey, nous sommes entre vos mains, général, comment pourrions-nous échapper à votre vengeance ? Mais, suivez les avis du vieillard qui vous parle, et vous pourrez sauver votre province. — Et bien, donnez vos raisons ! »

Kouey reprit : « Les deux généraux, Han-Sien et Yang-Fong, sur lesquels Youen-Chu s’appuie comme sur deux ailes, ont sous leurs ordres des soldats qui ne valent pas mieux qu’une volée de corneilles. Il n’y a en eux ni fidélité, ni envie de bien faire ; gardons la ville avec une moitié de nos gens, attaquons l’ennemi avec l’autre, et infailliblement nous remporterons la victoire. Je sais même un moyen excellent, non-seulement de défendre cette ville, mais encore de prendre Youen-Chu ! — Quel est ce moyen ? — Le voici : les deux généraux dont je vous parle suivent leur maître Youen-Chu, mais ils ne peuvent pas plus rester avec lui, que le phénix et la poule ne peuvent percher en même lieu ; Youen-Chu ne peut donc manquer d’être battu. Il a la sottise d’employer des hommes sur lesquels il ne doit pas compter[1]. Ces deux chefs, dont il a fait ses lieutenants, sont d’anciens serviteurs des Han ; la crainte que leur inspire Tsao-Tsao les a éloignés de la cour ; ils ont fui, et faute d’asile, ils sont venus rejoindre Youen-Chu qui, certainement, ne fait pas grand cas d’eux. Si par une petite lettre, vous obteniez de ces généraux qu’ils vous prêtassent leur appui, du milieu même de ce camp qui vous menace ; si vous ameniez Hiuen-Té à vous secourir aussi du dehors, assurément Youen-Chu serait bientôt à votre discrétion ! »

Liu-Pou voulut que Tchin-Teng allât porter lui-même la lettre à ces deux chefs ; celui-ci fut bientôt prêt. D’un autre côté, des cavaliers se dirigèrent avec un autre message vers Yu-Tchéou, où résidait Hiuen-Té.

Ce fut au camp de Han-Sien, que Teng, escorté de quelques

  1. Littéralement : il emploie des gens qui sont comme des tas d’herbes à brûler.