Page:Theodore Pavie - Histoire des trois royaumes vol 2, Duprat, 1851.djvu/39

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

En effet, le lendemain matin il l’établit sous sa tente, et pour éviter tous les discours compromettants que cette conduite pouvait provoquer de la part de ses officiers, il chargea Tien-Wei[1] de se tenir près de l’entrée de sa tente. Il donna pour consigne aux deux cents soldats de sa garde, de ne laisser pénétrer personne sous peine de mort, à moins d’un ordre spécial. De cette façon, le pavillon du général en chef resta à l’abri de toute visite importune.

Tsao s’oubliait en joyeux festins avec la veuve de Tchang-Tsy, et ne songeait plus à retourner dans la capitale. Les gens de sa maison avertirent Tchang-Siéou de ce qui se passait. « Quoi ! s’écria celui-ci avec indignation, ce Tsao que je regardais comme un modèle d’humanité et de vertus, le voilà maintenant qui se plaît à me couvrir d’infamie ! » Et il consulta son conseiller Kia-Hu. « N’ébruitez point cette affaire, répondit le mandarin ; si vous faites voir que vous savez tout, nous sommes perdus ! Demain, j’attendrai que Tsao sorte de sa tente, et puis….., vous verrez. »

Le lendemain, Tsao étant assis devant son pavillon, Tchang-Siéou (averti par Kia-Hu de ce qu’il devait faire), s’approcha, et lui demanda la permission de conduire au camp ses propres soldats nouvellement soumis, lesquels désertaient en très grand nombre. « Bien volontiers », répondit Tsao ; Tchang les divisa en quatre groupes et les répartit parmi ceux du premier corps d’armée (au nombre duquel se trouvait la tente de Tsao), qui occupait un lieu nommé Tao-Ty. Ces espions recueillirent des nouvelles ; par eux il sut que près de la personne du général en chef veillait ce Tien-Wei, héros athlétique, toujours armé de deux piques de fer, du poids énorme de quatre-vingts livres ; il était donc fort difficile d’approcher de Tsao.

Cependant un des officiers de Tchang, nommé Hou-Tché, capable de porter cinq cents livres, de parcourir à pied soixante-dix milles en un jour, homme extraordinaire par sa vigueur, remarquant l’inquiétude de son maître, lui en demanda la

  1. Voir vol. Ier, page 171.