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que ces Youen n’aient pas voulu s’appuyer sur leur zèle ! S’ils avaient su employer de pareils hommes, comment aurais-je osé regarder en face cette contrée !... » Il traita le mandarin comme un hôte de distinction, et le nomma l’un des intendants du palais. Tout joyeux de s’être attaché un tel homme, il lui dit : « Maintenant voilà que Youen-Chang s’est jeté dans les bras de son frère Youen-Hy ; enseignez-moi ce que j’ai à faire pour le prendre. » Et comme le mandarin gardait le silence, il s’écria : « Oh ! serviteur fidèle à ses anciens maîtres ! »

Interrogé à son tour, Kouo-Kia proposa de faire marcher contre ces deux frères les généraux Tsio-Tcho et Tchang-Nan, nouvellement soumis et qui avaient servi sous les ordres des deux jeunes princes ; ils viendraient à bout de les défaire. Tsao-Tsao goûta cet avis ;à ces deux commandants, il adjoignit Liu-Kwang, Liu-Tsiang, Ma-Yen et Tchang-Hy[1]. Chacun d’eux fut mis à la tête d’une division, et séparés en trois corps, ils marchèrent contre Yéou-Tchéou. Le premier ministre les suivait avec son armée, prêt à les soutenir. De son côté, Youen-Chang, sachant que l’avant-garde impériale se composait tout entière de soldats des provinces du nord qui avaient changé de drapeau, résolut, avec son frère, d’abandonner la place. Avec leur monde, ils s’enfuirent la nuit dans la direction de Liéou-Sy, cherchant un asile chez les Ou-Hoan[2],

Sur ces entrefaites, le commandant de Yéon-Tchéou, nommé Ou-Hoan-Tcho, ayant assemblé tous ses officiers, immola un cheval blanc[3], et voulut boire avec eux du sang de la victime pour sceller le serment qu’il leur proposait. Après leur avoir parlé de Tsao-Tsao et de sa lutte contre Youen-Chang et Youen-Tan, il trempa le premier ses lèvres dans le sang et dit : « J’ai entendu

  1. Tous ces généraux étaient des déserteurs qui avaient abandonné le parti des Youen.
  2. Ces Tartares avaient profité des troubles de l’Empire pour augmenter leur puissance ; on comptait plus de cent mille familles chinoises réfugiées et établies chez eux. (Histoire de la Chine, tome IV, page 43.)
  3. Voir, sur cette cérémonie, les détails donnés dans le 1° volume et les notes.