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la famine ; certainement la garnison tentera un coup de main après le départ des habitants. » Et il ordonna à deux généraux (Tchang-Léao et Hu-Hwang) d’aller, chacun avec trois mille hommes, s’embusquer aux deux côtés de la route. Lui-même, abrité sous le grand étendard, il déploya toute son armée autour de la ville.

En effet, les portes s’ouvrent ; les habitants qui soutiennent les vieillards et portent des enfants, s’avancent, tenant à la main des bannières blanches. « Je vois bien que ce peuple a beaucoup souffert dans la ville, dit Tsao-Tsao ; s’il ne la quittait pas, il y mourrait de misère ! » Ces malheureux vinrent en masse se jeter à ses pieds, et il leur fit distribuer des vivres par les soldats de son arrière-garde. Il y avait bien la dix mille personnes de tout âge ; quand cette foule eut fini d’évacuer la place, la garnison tenta une brusque sortie. À cette vue, Tsao-Tsao fit signe d’arborer un étendard rouge ; les deux généraux embusqués tombèrent sur la division qui se précipitait hors de la ville, la mirent en désordre, si bien qu’elle dut rentrer dans les murs. Tsao s’élança au galop à sa poursuite : arrivé sur le pont-levis, il est accablé par une grêle de traits qu’on lui lance d’en haut. Une flèche perce son cheval qui tombe mort, deux autres pénètrent dans son casque et lui effleurent le front.

Tous les généraux se précipitent au secours de leur maître qu’ils ramènent au milieu des rangs ; mais Tsao change de vêtements, prend un autre cheval et s’élançant à la tête de ses officiers, les entraîne vers le camp de Youen-Chang. Celui-ci accepte le combat ; complétement battu dans cette attaque générale où trois corps d’armée se sont réunis contre lui, il recule avec ses soldats éperdus jusqu’aux monts Sy-Chan. La, il campe tandis que des courriers vont avertir les deux lieutenants Ma-Yen et Tchang-Hy d’arriver au plus vite. Il ignorait que Tsao-Tsao venait de détacher vers eux les deux Liu, auxquels nous avons vu qu’il avait accordé le titre de princes[1] ; ces deux généraux rencontrèrent à moitié chemin ceux qu’ils cherchaient.

  1. Cette phrase est empruntée à l’édition in-18, qui la développe plus clairement que le texte chinois-mandchou. Ce sont les deux frères Liu-Kwang et Liu-Tsiang.