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impérial qui nommait celui-ci inspecteur de l’armée, en y joignant l’ordre de se réconcilier avec Hiuen-Té. Cela fait, le ministre marcha contre le rebelle Tchang-Siéou, à la tête de cinq cents mille hommes partagés en trois corps d’armée. La première division, commandée par Hia-Héou-Tun, prit les devants ; on était alors au cinquième mois de la deuxième année Kien-Ngan (198 de J.-C.)

Les troupes de Tsao-Tsao campèrent près de la rivière de Yu[1] ; Kia-Hu, le conseiller de Tchang-Siéou, dit à celui-ci : « Le premier ministre a ici des forces bien imposantes ; croyez-moi ; allez lui faire votre soumission avec tous vos officiers. Vouloir résister à une pareille armée, ce serait tenter l’impossible et attirer de grandes calamités sur le peuple et sur vos soldats ! » Le chef rebelle, agréant cet avis, envoya celui qui le lui avait donné près de Tsao. Enchanté de la facilité de son élocution, Tsao[2] voulut à l’instant même en faire son propre conseiller. « Autrefois, répondit Kia-Hu, en m’attachant à Ly-Kio[3] je me suis rendu coupable envers l’Empereur et envers l’Empire ; aujourd’hui, me voila partisan de Tchang-Siéou qui écoute mes paroles et accepte les plans que je lui propose ; je ne dois pas l’abandonner ! » Tsao applaudit à cette détermination ; dès le lendemain, Kia-Hu lui ayant présenté son maître, il le traita avec de grands égards ; puis il entra avec sa propre division dans la ville de Ouan, qui lui ouvrait ses portes. Le reste de l’armée campé hors des murs couvrait l’espace d’une lieue ; Tchang-Siéou traitait jour et nuit le premier ministre dans de somptueux banquets.

Un soir, au retour d’un de ces brillants festins, Tsao-Tsao se

  1. Le mot Yu ne se trouve pas dans le dictionnaire de Basile de Glemona. Celui de Kang-Hy l’explique par : rivière qui sort du sud-est du mont Lou-Tchy dans le district de Hang-Nong, et se jette dans le fleuve Mien (Bas. 4, 884). Le texte tartare dit : dans le lieu nommé Yu-Chouy, sans interpréter les deux caractères chinois.
  2. Littéralement : voyant qu’il répondait à ses questions comme l’eau qui coule.
  3. Voir vol. Ier, page 156.