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main sur la capitale, comme le lui proposait un soldat ; Tsé-Long se montrait prêt à partir, mais il refusa. « Gardons-nous d’attaquer, répondit-il ; sachons ménager nos forces ; et cette nuit nous abandonnerons notre camp, pour fuir vers les monts Jang-Chan. »

Tsé-Long fut donc obligé de rester enfermé sans combattre ; à la nuit, après que les troupes eurent pris leur repas, elles se retirèrent, l’infanterie en tête, la cavalerie à l’arrière. Dans le camp qui se vidait ainsi, on ne cessa pas de frapper les veilles pour tromper l’ennemi. Une fois dehors, Hiuen-Té marcha pendant quelques heures ; mais bientôt il vit que sur les collines échelonnées devant ses pas, l’incendie s’élevait illuminant l’horizon. Au sommet des hauteurs, des voix crièrent : « Ne laissez pas fuir Hiuen-Té... Son excellence est là qui attend. »

De toutes parts les flammes lancent leur clarté vers le ciel ; le tambour ébranle le firmament. Sur la montagne paraît le ministre en personne, et il crie : « Rends-toi, Liéou-Pey[1] ! » Celui-ci, éperdu, cherche par où fuir : « Maître, lui dit Tsé-Long, ne craignez rien, suivez votre serviteur ; » et la lance au poing, le jeune héros poussant son cheval, s’ouvre un passage à travers les rangs ennemis ; Hiuen-Té le suit, armé du double glaive. Au milieu de cette mêlée, survient Tchang-Liéao qui s’attaque à Tsé-Long ; sur les pas des fugitifs arrive précipitamment YuKin, et tandis que Hiuen-Té le combat, (un autre lieutenant du premier ministre) Ly-Tien arrive à son tour.

Se voyant perdu, Hiuen-Té fuit à travers la plaine : derrière lui des cris s’élèvent de nouveau et s’étendent au loin ; il se plonge au milieu des défilés de la montagne, il se sauve tout seul, et galope jusqu’à l’aurore. A ses côtés paraît encore une division de soldats, l’épouvante le saisit ; mais ce sont mille cavaliers environ, reste de la petite armée vaincue de Liéou-Py (à qui Hiuen-Té avait confié la défense de Jou-Nan). Ils ont amené au milieu d’eux la famille entière de leur maître ; là se retrouvent,

  1. C’est le nom de famille de Hiuen-Té.