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fait un geste d’appel avec son fouet, toute l’armée entoure son chef et la mêlée devient générale ; depuis midi jusqu’au soir, on se porte, de part et d’autre, des coups terribles ; enfin, la nuit sépare les combattants ; la retraite sonne[1], et des deux côtés les troupes reviennent à leur camp.

Là, Tsao consulte ses généraux ; il leur demande un moyen d’écraser son adversaire, de remporter une victoire décisive. Tching-Yu proposa un plan que le généralissime adopta[2] ; pour venir à bout de Youen-Chao, il fallait d’abord que Tsao reculât jusqu’a la rivière, puis disposât ses embuscades. L’ennemi ne manquerait pas de poursuivre la division en retraite, et il serait détruit. Voici ce qui fut fait : Les deux ailes se composaient chacune de cinq divisions, commandées par Héou-Tun, Tchang-Liéao, Ly-Tien, Yo-Tsin, Héou-Youen, pour la gauche ; par Tsao-Hong, Tchang-Ho, Su-Hwang, Yu-Kin, Kao-Lan, pour la droite ; l’avant-garde de la division du milieu avait pour chef Hu-Tchu. Le lendemain, Tsao fit avancer ces divisions au nombre de dix, et les plaça en embuscade à droite et à gauche ; lui-même, au milieu de la nuit, avait détaché l’avant-garde pour simuler une attaque sur le camp ennemi. A la vue de cette démonstration, les cinq corps d’armée de Youen-Chao s’étaient mis en mouvement, et Hu-Tchu reculant avec les siens, attirait les soldats ennemis sur ses traces. Les cris de la mêlée retentissaient sans cesse ; au point du jour, les fuyards se trouvaient rendus sur les bords du fleuve ; et comme il n’y avait pas à reculer davantage, Tsao s’écria à haute voix : « Me voila, soldats, pourquoi ne pas combattre à outrance ! »

Aussitôt ses troupes font volte-face, et opposent une résistance

  1. Littéralement : on frappa le lo ; c’est un instrument de musique militaire, un grand bassin de cuivre sur lequel, disent les écrivains qui ont traité de la stratégie, on doit frapper pour donner l’ordre de la retraite.
  2. C’est, dit le texte, celui qu’on nomme : placer des troupes en embuscade sur dix faces. Voici ce que l’édition in-18 ajoute en note : Ce fut le stratagème qu’employa Han-Sin pour vaincre Hiang-Yu. S’adosser à la rivière pour déployer ses troupes, ce fut le stratagème qu’employa Han-Sin pour vaincre Tchin-Yu. (Voir sur ces événements l’Histoire générale de la Chine, vol. II, pages 460 à 484).