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« Et moi, j’ai aussi reçu de l’Empereur un ordre particulier qui m’enjoint d’exterminer les traîtres, ennemis de la majesté souveraine... »

À ces mots, Tsao exaspéré lance contre un des généraux ennemis son lieutenant Tchang-Liéao ; les deux champions luttent longtemps avec des forces égales, et bientôt deux autres chefs se sont précipités hors des lignes. Pendant ce double duel, Hia-Héou-Tun et Tsao-Hong, sortis du camp sur l’ordre du ministre, chacun avec mille hommes, se jettent au travers de l’armée ennemie. C’est alors que Chen-Pey qui se tenait sur la tour aux signaux[1], voyant cette manœuvre, donna le signal convenu. D’une part les arbalétriers, de l’autre les archers assaillirent avec violence les troupes de Tsao et les mirent en pleine déroute ; poursuivis dans leur retraite, les fuyards furent forcés de se replier sur Kouan-Tou[2] : aussitôt Youen-Chao à la tête de son armée s’approcha de ce lieu et y dressa son camp.

« Maintenant, dit Chen-Pey, établissons dix mille hommes en ce lieu pour le tenir en état de défense, puis fermons le camp de Tsao avec une montagne de terre rapportée, d’où nos gens puissent le dominer et l’accabler de projectiles. Tsao sera très certainement obligé d’évacuer cette position (pour se porter de l’autre côté des montagnes) ; et nous, une fois maîtres des défilés, des passages, nous enlèverons la capitale. » Youen-Chao adoptant ce conseil, chargea ses plus vigoureux soldats d’élever des montagnes qui, dans un espace de plusieurs lieues, cernassent le camp de Tsao. Appuyée d’un côté sur le fleuve, adossée aux monts qui ne présentent que des gorges étroites, l’armée du premier ministre ne savait trop par où se choisir un chemin.

  1. Littéralement  : la tour du général ; elle est d’ordinaire placée à l’un des angles du camp. Voir vol. VII et VIII des Mémoires sur les Chinois, la description et la figure de ces tours.
  2. Nous avons déjà remarqué que ce mot signifie le grand gué, le grand passage ; en le reproduisant sous la forme de Kouan-Tou, on peut comprendre que ce nom s’applique à un village voisin, désigné par la même dénomination. — Ces détails de combats ont été abrégés. — L’édition in-18 fait observer que les soldats du nord, très exercés au maniement de l’arc, l’emportaient de ce côté sur ceux du midi.