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frères, avec l’espérance que ma mère le dirigera sans cesse par ses conseils. Les anciens serviteurs du père et du frère aîné méritent d’être traités avec égards. — Hélas ! dit la mère du mourant avec des sanglots, je crains que votre jeune frère ne soit, par sa trop grande jeunesse, incapable de maintenir votre puissance ; alors, que deviendrons-nous ? »

« Sun-Kuen, reprit le moribond, l’emporte sur moi de beaucoup ; notre souveraineté n’est en rien menacée ; si les affaires de l’intérieur offrent quelque embarras, qu’il consulte Tchang-Tchao. Si les inquiétudes viennent du dehors, qu’il consulte Tchéou-Yu ; malheureusement ce dernier n’est pas ici parmi ceux qui m’entourent et je ne puis lui adresser mes recommandations ! »

Puis, à ses trois autres jeunes frères il adressa les paroles suivantes : « Après ma mort, obéissez aux ordres que vous dictera votre aîné Sun-Kuen. S’il se trouve dans la famille quelqu’un qui sème la discorde, réunissez-vous pour le faire périr. Un parent qui se révolte contre les siens, n’est plus digne de reposer auprès de ses ancêtres[1] ! »

Enfin, il appela à ses côtés son épouse Kiao-Sé, et lui dit : « Hélas ! nous voilà séparés au milieu de la vie ! Que votre jeune sœur vous rende des devoirs assidus ; qu’elle ait surtout une grande condescendance pour son époux Tchéou-Yu ; de votre côté, montrez-vous dévouée envers mes jeunes frères. N’oubliez pas mes dernières volontés, et pendant toute votre vie, témoignez un grand respect à ma mère, sans jamais relâcher le lien qui unit les membres d’une même famille. » — Et se tournant vers les mandarins civils et militaires, il ajouta  : « Vous tous, servez avec zèle mon jeune frère. Méritez le nom de serviteurs dévoués et fidèles. — Et vous, Sun-Kuen, si vous veniez à méconnaître les services d’un mandarin digne de votre estime, au bord des neuf fontaines où je vais habiter sous la forme d’un esprit, croyez-le, je refuserais un jour de vous voir ! »

  1. C’est-à-dire qu’étant considéré comme coupable de rebellion, il est séparé jusque dans la tombe du reste de la famille. La jeune sœur dont il parle quelques lignes plus bas, est sa propre sœur. Voir vol. I°, page 119.