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avec cette inscription  : « Mis à mort comme magicien et comme imposteur ». Pendant toute la nuit, jusqu’au matin, le vent souffla et la pluie continua de tomber ; le cadavre du sorcier disparut ; quand on lui annonça cette nouvelle, Sun-Tsé furieux voulut faire décapiter ceux à qui il en avait confié la garde ; mais tout à coup, il aperçut distinctement devant la salle d’audience, le devin en personne qui venait à lui, marchant au milieu d’une nuée sombre. Déjà Sun-Tsé avait saisi son glaive pour couper la tête du fantôme, quand il fut pris d’une faiblesse subite et tomba à terre.


II[1].


Les gens du palais le transportèrent dans sa chambre a coucher, sans qu’il revînt de son évanouissement.Sa mère accourut pour le voir, et ce fut alors que reprenant aussitôt ses sens, il lui raconta l’apparition dont il avait été témoin. « Mon fils, lui répondit sa mère, en vous obstinant à tuer un immortel, vous vous êtes attiré de grands maux ! — Dès ma plus tendre enfance, répliqua Sun-Tsé, avec un sourire, j’ai suivi mon père dans ses expéditions ; j’ai abattu des hommes comme des brins de chanvre, par milliers, des bons et des mauvais ; et quel malheur me suis-je attiré ? Aujourd’hui, j’ai décapité un sorcier, pour couper court à de grandes calamités, qu’y a-t-il la qui puisse m’inspirer des craintes[2] ! — La foi vous a manqué, ajouta sa mère, et voilà ce qui vous a réduit à cet état ! Il faut faire de bonnes œuvres pour appaiser les esprits irrités. — Ma vie dépend du ciel, répliqua Sun-Tsé, que peut contre moi un sorcier ? »

  1. Vol. II, livre VI, chap. V, page 102 du texte chinois.
  2. Cette foi d’une femme dans les esprits, c’est bien le sentiment d’une mère qui aime tendrement son fils. Ne devait-il pas aussi calmer par des prières et des sacrifices les mânes du mandarin décapité (Hu-Kong), et des trois partisans de celui-ci qu’il avait tués ? Peut-on ne faire aucun cas des âmes des morts et respecter ainsi un être surnaturel ? (Note de l’édition in-18).