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nant tous des recettes magiques pour traiter les maladies de l’humanité ; ces recettes sont appelées Kin-Tchéou-Ko. Et le pauvre religieux, les ayant eues en son pouvoir, a publié les enseignements reçus par lui au nom du ciel, converti et guéri les hommes de l’Empire ; et cela sans jamais accepter le plus modique salaire ; comment donc pourrait-il corrompre l’esprit des soldats de votre altesse ?

« Si vous n’acceptez aucun salaire en argent, reprit Sun-Tsé, pourquoi donc recevez-vous de la nourriture et des vêtements ? Vous n’êtes qu’un brigand de Bonnet-Jaune, un disciple du rebelle Tchang-Kio ! Si je ne vous fais pas périr à l’instant, vous serez un jour le fléau de l’Empire ! » — Et il donna l’ordre aux gens de sa suite de décapiter le vieillard.

Le conseiller Tchang-Tchao prit la parole et fit observer que ce Tao-Ssé, établi depuis dix ans à l’est du fleuve Kiang, n’y avait jamais commis la plus légère faute ; il ne fallait donc pas le mettre à mort, sous peine de s’aliéner l’esprit du peuple. « Ce n’est qu’un montagnard, un paysan stupide, reprit Sun-Tsé ; j’ai envie d’essayer sur ce sorcier mon glaive précieux comme je le ferais sur quelque animal immonde ! » Les mandarins cherchèrent à le détourner de ce mauvais dessein, ce qui ne fit qu’augmenter sa colère ; il ordonna de mettre au vieillard les fers et la cangue, et de le jeter en prison.

Aussitôt les mandarins, se retirant chacun chez soi, allèrent dire à leurs fenmes de se rendre vers la mère de Sun-Tsé, pour intercéder près d’elle en faveur du vieillard. Celle-ci fit appeler son fils dans les appartements réservés, et lui dit : « J’ai appris que vous avez fait lier et emprisonner le docteur Yu-Ky. Cet homme, en donnant la victoire à votre armée et en guérissant les malades, a rendu de grands services aux officiers et aux soldats ; il ne faut pas le faire périr. — C’est un dangereux sorcier, répliqua Sun-Tsé ; par ses talismans il corrompt l’esprit de la multitude. Il est déjà cause que tous mes officiers (ne me regardent plus avec la même considération), n’ont plus pour moi le respect qu’un sujet doit à son souverain. Ne sont-ils pas tous descendus, de la galerie où je me trouvais, pour se