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abondance, et se fait jour à travers les troupes jusqu’à Han-Fou ; celui-ci ne peut se soustraire à sa poursuite ; il tombe renversé par un coup de sabre qui lui fend la tête et les épaules. Les troupes sont taillées en pièces : Yun-Tchang escorte de nouveau le petit char et franchit le passage après avoir bandé sa plaie, chemin faisant, avec un morceau de sa ceinture ; car il n’ose s’arrêter en route, dans la crainte de quelque autre embûche.

Ce fut donc en pleine nuit qu’il marcha vers le passage de Y-Chouy, confié à la garde d’un officier (natif de Ping-Tchéou), du non de Pien-Hy, fort habile à manier le fléau de fer, ancien chef des Bonnets-Jaunes, élevé à cet emploi par Tsao, en récompense de sa soumission. Averti de la mort du commandant de l’autre passage, Pien-Hy tendit un piége à Yun-Tchang. Deux cents hommes embusqués dans un temple bouddhique[1], à quelques pas en avant des portes, devaient attendre, pour agir, le signal qu’il leur donnerait en frappant sur une assiette (au milieu d’un repas).

Quand Yun-Tchang vit s’avancer vers lui cet officier aux manières empressées, il descendit de cheval pour l’aborder plus poliment : « Général, lui dit le commandant, votre réputation s’est étendue dans tout l’Empire ; qui ne s’humilierait devant vous ? Aujourd’hui vous allez rejoindre le parent de l’Empereur, Hiuen-Té, obéissant ainsi au premier devoir d’une inaltérable fidélité ! » Pour toute réponse, le héros lui raconta le sort que venaient d’éprouver les commandants des deux autres passages ; Pien-Hy ajouta : « Vous avez fort bien fait de les tuer ; quand je verrai son excellence le premier ministre, je vous excuserai moi-même ! »

Le héros remonta à cheval plein de joie, et s’avança vers le

  1. Le temple se nommait Tchin-Koué-Ssé ; une note insérée dans les deux textes explique qu’il était consacré à Bouddha. Le mot ssé ( Basile, 2,188), dit la note, signifie temple dédié à Bouddha (à Foe), tandis que miao (Basile, 2,511 et 2,564)se prend pour un temple consacré aux Esprits. L’éditeur du texte in-18, qui tenait pour la secte de Confucius, en sa qualité de lettré, ajoute l’observation suivante  : Dans un pays bouddhique, il se trouve des bandits qui conspirent contre la vie des honnêtes gens ; ce qui ne prouve pas que les religieux fussent incapables d’un pareil crime.