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commun ! — Trève de vaines paroles !… » s’écria le héros, fouettant son cheval et brandissant son cimeterre recourbé.

Kong-Tou ne résista pas longtemps à cette attaque ; poursuivi par Yun-Tchang, il se détourne et lui dit : « Votre ancien maître vous a comblé de bienfaits, ne les oubliez donc pas ! Venez, venez vite dans le Jou-Nan, nous vous céderons cette province. »

Comprenant le sens de ces paroles, Yun-Tchang appelle ses soldats et les lance sur l’ennemi ; les deux chefs rebelles qui fuient à dessein, laissent leurs troupes se disperser au hasard. Le chef-lieu de la province tombe au pouvoir du héros ; il rassure la population et se hâte de ramener son armée dans la capitale (comme s’il eût achevé une campagne sérieuse). Tsao-Tsao étant venu pompeusement à sa rencontre, donna des récompenses aux soldats ; après le festin d’usage, Yun-Tchang rentra à son hôtel et s’agenouilla sur le seuil de la porte des appartements qu’habitaient les deux femmes de Hiuen-Té.

« Beau-frère, demanda Kan (l’une des deux femmes), dans cette expédition avez-vous eu quelque nouvelle de notre époux ? — Non, » répliqua le héros ; et il se retira, laissant les deux dames en proie à la plus vive douleur. « Hélas ! disait (l’autre femme nommée) My, notre maître est mort ! Dans la crainte de mettre le comble à nos chagrins, notre beau-frère nous cache cette affreuse vérité ! » Et elles se désespéraient ; l’un des vétérans placés en faction devant leur demeure, ayant entendu les larmes et les sanglots des deux dames, dit à travers la porte : « Ne pleurez point ainsi ! Notre seigneur et maître est au nord du fleuve, à la cour de Youen-Chao. — Comment le savez-vous, demandèrent-elles ? — Dans cette campagne, le général a reçu la visite de quelqu’un qui le lui a appris. »

A l’instant même elles firent appeler Yun-Tchang et lui adressèrent de vifs reproches. « Elles ne pouvaient donc plus compter sur lui ; les bienfaits, les bons traitements de Tsao avaient effacé dans son cœur ses sentiments anciens, puisqu’il leur cachait une si importante vérité ? — Voulez-vous donc, ajoutaient-elles, nous faire mourir de chagrin, tandis que vous vivrez ici dans les honneurs et les richesses ? Prenez en main votre glaive précieux et