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soulevés pour prêter l’appui de leurs forces à Youen-Chao, et l’aider à abattre le puissant ministre Tsao. Grâce au ciel, j’ai été informé de votre présence à la tête de ce corps d’armée, et mes deux chefs m’ont fait conduire ici par un soldat pour recueillir des informations. Demain ils se feront battre tout exprès, et s’entendront avec vous dans leur fuite. Vous, général, courrez prendre les deux femmes de Hiuen-Té (restées à la capitale) et venez vous joindre à votre frère. Retiré avec nous dans le Jou-Nan, vous verrez s’y former une nouvelle ligue, car les deux chefs que je sers se soumettront à Hiuen-Té. J’attends ce que vous allez décider et je compte sur vous ! »

« Si mon frère aîné se trouve près de Youen-Chao, répliqua Yun-Tchang, j’irai le rejoindre, même en pleine nuit ; mais c’est que j’ai décapité deux des premiers officiers de ce Youen-Chao, et je crains que les choses ne soient changées[1] ! — Dans ce cas, laissez-moi aller sonder le terrain, et je reviendrai vous dire d’où en sont les choses… »

« Ah ! s’écria le héros, pour revoir le visage de mon frère aîné, je braverai dix mille morts ! Je retourne à la capitale pour prendre congé de Tsao. »

Et cette même nuit, il se sépara affectueusement de Sun-Kien, sans que ses deux lieutenants (Yu-Kin et Yo-Tsin, officiers de Tsao) osassent l’interroger sur cette singulière entrevue. Le lendemain, quand ses troupes se disposèrent à combattre, un des chefs rebelles, Kong-Tou, parut devant les lignes ; et Yun-Tchang lui ayant demandé a haute voix pourquoi il méconnaissait l’autorité de l’Empereur, le guerrier répliqua : « Et vous, ne méconnaissez-vous pas celle de votre maître ? Quel reproche pouvez-vous m’adresser ? — En quoi tournai-je le dos à mon maître, dit Yun-Tchang ? — Vous l’ignorez, répondit Kong-Tou ; Hiuen-Té est auprès de Youen-Chao, et vous, vous êtes avec leur ennemi

  1. Ce que l’édition in-18 explique dans une note, de la manière suivante : Il ne craint pas que Youen-Chao le mette à mort pour cela, mais il craint qu’à cause de cela, Hiuen-Té n’ait pas pu rester près de Youen-Chao. La preuve, c’est qu’il ajoute plus bas : Si mon frère aîné se trouve encore près de celui-ci, je l’irai rejoindre très certainement.