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d’un fils bien-aimé l’avait empêché de lui porter secours : « J’étais plongé dans l’accablement, ajouta-t-il ; mais le bonheur de vous voir m’est une grande consolation ; le vœu ardent de toute ma vie est exaucé ! — Depuis longtemps, répondit Hiuen-Té, je souhaitais de me ranger à votre parti ; l’occasion seule m’avait manqué ! Aujourd’hui mes deux femmes sont au pouvoir de Tsao ; je suis seul au monde[1]. Sachant que votre seigneurie reçoit et accueille avec distinction tous ceux qui lui demandent un refuge, je suis venu me jeter entre ses bras sans reculer devant la honte, sans rougir ! j’espère trouver près d’elle secours et appui. »

Ce langage plut à Youen-Chao ; ses enfants et lui témoignèrent de grands égards à Hiuen-Té.

Cependant, cette même nuit, Tsao déjà maître de Siao-Pey marchait sur (le chef-lieu de la province) la ville de Su-Tchéou, que My-Tcho et Kien-Yong[2] abandonnèrent, faute de pouvoir la défendre. Tchin-Teng en livra les portes : Tsao y entra avec sa division principale, rassura le peuple[3], et appela ses conseillers autour de lui, afin de délibérer avec eux sur les moyens de prendre Hia-Py.

« Yun-Tchang y est enfermé avec la famille entière de son maître, dit Sun-Yo ; il s’y défendra en désespéré. Cependant il importe de s’en emparer au plus vite, car le moindre retard pourrait mettre cette place au pouvoir de Youen-Chao. — Mais comment prendre cette ville, demanda Tsao ? — Seigneur, reprit le conseiller, veillez à la garde du chef-lieu, et tâchez d’attirer Yun-Tchang au combat. S’il sort pour combattre, vous enlèverez la ville; une fois la ville enlevée, nous le prendrons lui-même (puisqu’il ne lui restera plus d’asile). »

  1. L’Empereur n’avait pas pu protéger son oncle Tong-Tching, ni les sept cents personnes de la famille de celui-ci (mises à mort par Tsao-Tsao) ; comment Hiuen-Té aurait-il pu être rassuré sur le sort de ses deux femmes ? (Note de l’édition in-18).
  2. Voir plus haut, page 150. Tchin-Teng, on se le rappelle, a joué un rôle assez singulier auprès de Liu-Pou d’abord, puis auprès de Tsao lui-même.
  3. Cette expression paraît avoir le double sens de faire accepter au peuple un changement de maître, et de l’assurer positivement que la ville ne sera point pillée.