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Ni-Hang, je suis un serviteur de la dynastie des Han [1] et je ne me fais point le partisan de Tsao, qui trompe le peuple… »

Ils l’auraient tué si Sun-Yo ne les eut arrêtés : « Son excellence a dit qu’autant vaudrait tuer un moineau, un rat ; et l’a laissé vivre. Irions-nous donc inutilement ternir et souiller nos glaives et nos haches ? — Si je suis un moineau, un rat, au moins j’ai le cœur, l’esprit d’un homme, dit Ni-Hang ; tandis que vous, vous êtes un essaim de mouches, un tas de fourmis ! »

Les courtisans se dispersèrent fort mal disposés à l’égard du philosophe, qui se rendit à King-Tchéou près de Liéou-Piao. Bien qu’il louât la vertu, bien qu’il ne parlât qu’au nom de la vérité, Ni-Hang ne plut pas à ce seigneur, et celui-ci l’envoya vers l’un de ses généraux Hwang-Tsou [2], qui commandait à Kiang-Hia. Cet officier ne connaissait ni les livres sacrés ni les rites ; il était même d’un caractère violent et emporté. Quelques mandarins demandèrent donc à Liéou-Piao pourquoi il n’avait pas puni de mort l’insolence du philosophe qui se jouait de lui.

« Déjà, répondit-il, cet homme a injurié Tsao, et Tsao ne l’a pas mis à mort afin de s’attirer l’estime publique. S’il me l’a expédié, c’est pour me donner la tentation de lui abattre la tête, pour me fournir l’occasion de me montrer persécuteur des sages, et d’acquérir la réputation d’un homme inique. Si aujourd’hui je l’adresse à Hwang-Tsou, c’est pour prouver à mon tour à Tsao que j’ai autant de prudence que lui. »

Les conseillers Kouey-Youé et Tsay-Mao admirèrent la sagacité de leur maître. Or, sur ces entrefaites, arriva aussi un envoyé de Youen-Chao ; Liéou-Piao le fit descendre à l’hôtel des Postes, et assembla ses mandarins pour leur demander vers lequel des deux partis représentés chacun par un émissaire, il était convenable de se tourner ? « Aujourd’hui, répondit le chef du conseil Han-Song, les deux rivaux (Youen-Chao et Tsao-Tsao) sont aux prises ; votre intérêt serait de saisir cette occasion et de détruire

  1. Et en cela, dit l’édition in-18, il avait une tête, un chef, c’est-à-dire l'empereur légitime, tandis que les courtisans qui reconnaissaient Tsao-Tsao pour maître, en manquaient.
  2. Voir vol. Ier, page 124.