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le premier dans l’Empire, et que celui de Ou [1] perdit jusqu’à son nom. Un général qui sait se conduire, saisit le moment favorable à ses desseins sans s’occuper des autres circonstances. Seigneur, suivez les avis du vieillard qui vous a écrit cette lettre ; priez Hiuen-Té de se joindre à vous pour détruire Tsao qui n’est qu’un brigand. D’une part, vous répondrez à l’intention manifestée par le ciel ; de l’autre, vous irez au-devant des désirs du peuple. Seigneur, réfléchissez à ces choses ! »

Les quatre conseillers dissertaient sans que rien pût être conclu, quand tout à coup deux autres mandarins, Hu-Yéou et Sun-Tchin entrèrent dans l’assemblée : « Voila deux personnages qui ont des connaissances plus étendues, des vues plus larges, dit Youen-Chao ; je veux avoir leur avis. » — Quand ils eurent fini leurs respectueuses salutations, il leur expliqua l’affaire en peu de mots. Les deux conseillers, Tien-Fong et Su-Chéou, n’étaient point comme Chen-Pey et Kouo-Tou, des amis des deux nouveaux venus. Chen-Pey et Kouo-Tou suivaient donc du regard ceux-ci qui, d’accord avec eux, répondirent : « Quand le ciel offre, ne pas recevoir, c’est aller au-devant de sa ruine. Si vous ne levez pas des troupes, Tsao l’emportera sur vous ! — Ce que vous dites-la est ce que je pensais moi-même [2] », répliqua Youen-Chao. Décidé à faire la guerre, il renvoya Sun-Kien vers son maître, en le chargeant de lui annoncer sa détermination : « Allez, lui dit-il, et de votre côté tenez-vous prêts à agir ! »

En conséquence, Chen-Pey et Fong-Ky furent mis à la tête de l’armée avec le titre de généraux ; les trois autres mandarins (nommés

  1. Allusion historique au dernier prince de Ou, Fou-Tcha, qui se pendit après avoir été vaincu par le prince de Youe ou Y u-Youe, l’an 473 avant notre ère. Fou-Tcha avait défait les armées de Youe dans une première guerre ; malgré les conseils d’un de ses généraux, il ne voulut point exterminer son ennemi ; celui-ci finit par lui enlever ses états et par se faire proclamer Pa, c’est-à-dire le premier des vassaux. Histoire générale de la Chine, vol. II, page 227 et suivantes.
  2. L’écrivain chinois veut faire ressortir le caractère indécis de Youen-Chao ; embarrassé sur le parti qu’il doit prendre, ce faible personnage recueille les avis de tout le monde, et se contente de joindre le sien à celui du plus grand nombre.