Page:Theodore Pavie - Histoire des trois royaumes vol 2, Duprat, 1851.djvu/140

Cette page n’a pas encore été corrigée

son heure, parcourt en maître tout l’Empire. Vous, Hiuen-Té, qui depuis longtemps avez rempli des emplois aux. quatre coins de l’Empire, vous devez, sans aucun doute, avoir rencontré ce héros qui est le premier de sou siècle. Dites, quel est-il ? — Avec des yeux de chair [1] (que n’illumine point un esprit supérieur), Liéou-Hiuen-Té pourrait-il avoir distingué ce héros et Je faire connaître, reprit celui-ci ? — Mettez de côté cette modestie, répliqua Tsao ; au fond de votre cœur, j’en suis convaincu, vous avez une opinion arrêtée sur ce point,— C’est vous qui dans votre bonté m’avez accordé un grade à la cour ; en vérité, je ne connais point encore les héros, les sages qui se trouvent.... — Au moins vous savez les noms, si vous ne connaissez pas les personnes ! Je vous en prie, causons de ce qui se passe dons notre siècle. »

« Dans le Hoay-Nan, reprit Hiuen-Té, il y a Youen-Chu, qui possède une belle année, d’abondantes provisions ; on peut l’appeler un héros ! — Ah ! ah ! s’écria Tsao en riant ; c'est un vieux os pourri dans une bière ! Un de ces jours, soyez-en sur, j’en viendrai à bout. — Au nord du fleuve Ho, il y a Youeu-Chao ; dans sa famille, depuis quatre siècles, se trouvent réunies les trois grandes dignités de l’Empire [2] ; parmi les anciens mandarins il compte beaucoup de clients. Pareil à un tigre, il tient sous sa dépendance le Ky-Tchéou ; il a à son service un grand nombre d’hommes capables ; on pourrait lui appliquer cette dénomination de héros.... »

« Non, interrompit Tsao avec un sourire ; ce Youen-Chao est une statue imposante d’aspect, mais vide à l’intérieur ; il aime former des projets et ne s’arrête à aucun. Dans les grandes occasions, il ne sait pas se risquer, et pour un petit avantage il aventure follement sa vie ; c’est la un homme qui peut à peine causer quelque inquiétude, et non un héros [3] ! »

  1. Le texte mandchou dit simplement : Liéau-Pey 'mentouhoun ; Liéou-Pey qui n'a pas de talent.
  2. Voir l’explication de ce mot san-kong, les trois grandes dignités, à la note de la page 301, vol. Ier.
  3. Dans ce long dialogue, l’auteur passe en revue les principaux personnages de son histoire, afin de les remettre dans l’esprit du lecteur et de le tenir en haleine.