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complices ; raffermissez le trône chancelant ; extirpez la race des tyrans jusqu’à sa racine. Quel bonheur vous causerez à mes ancêtres ! Dans mon anxiété, j’ai écrit avec mon sang l’ordre ci-joint que je vous confie. Surtout de la prudence ! Ne refusez pas la mission dont je vous charge.

» Écrit le troisième mois de la quatrième année Kien-Ngan. »

A la lecture de ces lignes, Tong-Tching fondit en larmes. Agité de mille pensées, il ne pouvait ni manger ni boire, ni rester en un même lieu ; une invincible tristesse l’accablait. Cachant aussitôt cet écrit dans sa manche, il se retira dans son. cabinet de travail, et le lendemain se mit à relire l’édit impérial deux et trois fois, sans trouver aucun moyen de secourir le prince ; puis il. le plaça sur son bureau, rêvant toujours de quelle façon il viendrait à bout d’abattre l’arrogant ministre. Ses pensées l’occupant, mais aucun projet ne s’offrant à son esprit, Tong-Tching s’allongea sur sa table et s’endormit ; il était donc sous l’empire du sommeil, quand l’intendant du palais, Wang-Tsé-Fou, se présenta à son hôtel. Les portiers n’osèrent lui refuser l’entrée, car il était très lié avec leur maître ; si bien que le mandarin pénétra jusque dans le cabinet, et Tong-Tching ne s’éveilla pas. De dessous la manche de celui-ci sortaient le morceau de gaze blanche et le mot : moi, l’Empereur ! Wang-Tsé-Fou tout surpris attira furtivement l’écrit impérial et le glissa dans sa propre manche, puis il dit à haute voix : « Eh ! mon ami, vous dormez là bien tranquillement ! »

Éveillé en sursaut, Tong-Tching s’aperçoit que l’édit impérial a disparu ; il est prêt à se trouver mal, ses pieds et ses mains tremblent : « Ah ! reprit Wang-Tsé-Fou, vous voulez tuer le premier ministre ; et bien, je vous dénonce ! »

« Frère, répondit Tching en sanglotant, si vous me dénoncez, c’en est fait des Han et de tout ce qui reste de la famille impériale !»

« J’ai voulu rire, dit le mandarin ; de père et fils, nous vivons, mes ancêtres et moi, des revenus que nous ont assurés les Han, et je me montrerais si ingrat envers un Empereur de cette dynastie !.. Je suis prêt à vous aider de toutes mes forces dans votre projet d’anéantir les brigands qui oppriment le souverain.»