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cerner la ville du côté de l’est et du sud, pour se porter tous vers la partie opposée ; l’un des trois chefs insurgés, Han-Tchong, se retira en fuyant ; Tchu le poursuivit avec ses trois divisions, le défit et le tua lui-même à coups de flèches : mais pendant que cette armée était en pleine déroute, survinrent les deux autres chefs rebelles qui assaillirent les troupes impériales ; Tchu battit même en retraite devant les forces supérieures de Tchao-Hong, et celui-ci profita de cet avantage pour rentrer dans la ville de Hiuen-Tching.

Campé à trois lieues des remparts, Tchu-Tsuen voulait retourner au combat, lorsque dans l’est il aperçut un groupe de cavaliers qui venait vers lui. À leur tête marchait un homme vigoureux, au visage large, nerveux comme un tigre et musculeux comme un ours. Il se nommait Sun-Kien[1].

À l’époque d’une précédente révolte suscitée par Hu-Tchang, de Oey-Ky (lequel prenait le titre de Hwang-Ty, empereur auguste), il avait, de concert avec le général de cavalerie du canton, rassemblé mille jeunes gens, rejoint les troupes de la province, attaqué le chef des insurgés et tué son fils. Cet exploit, mis sous les yeux de l’empereur par le vice-roi, lui avait mérité le grade plus important de sous-gouverneur de plusieurs districts. Cette fois, à l’apparition des Bonnets-Jaunes, il avait recueilli sous ses drapeaux les jeunes hommes des villages et les marchands ; cette levée, jointe aux troupes réglées de la province, formait un contingent de quinze cents hommes ; il les amenait précisément à Tchu-Tsuen, qui, trop heureux de la rencontre, le détacha vite avec l’ordre d’attaquer la porte sud de la ville : lui-même il devait menacer celle de l’ouest, et

  1. Son surnom Wen-Tay ; Il était de Fon-Tchun dans le Ou-Kun. À l’âge de dix-sept ans, étant secrétaire d’un chef de district, il s’en alla demeurer avec son père à Tsien-Tang. Là, une dizaine de pirates, après avoir volé des marchands, partagèrent le butin sur le bord de la mer ; aussi personne n’osait se hasarder avec des barques dans le voisinage de leur retraite. « Si nous mettions la main sur ces brigands ? dit Sun-Kien à son père. — Ne tente pas l’entreprise, répondit celui-ci. » Le jeune homme se jette à l’instant sur son sabre, gravit le rivage en poussant des cris, et épouvante les pirates qui, se croyant attaqués par les troupes du gouverneur, s’enfuient en abandonnant leur butin. Sun-Kien en tua un. Cet exploit le fit connaître dans le canton ; il lui valut le grade d’officier dans l’armée.