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se lança avec deux mille hommes de troupes réglées sur lesquelles il pouvait compter ; les brigands, forcés de se retirer, abandonnèrent précipitamment les deux points qu’ils avaient voulu secourir ; Hiuen-Té les prit à revers, les tailla en pièces, et à peine se furent-ils jetés en désordre dans la ville, que Tchu fit quatre divisions de ses troupes pour mieux les assiéger.

Les vivres manquaient dans la place ; un parlementaire vint au nom du chef des rebelles proposer une capitulation, qui fut rejetée malgré les conseils de Hiuen-Té. « Si Kao-Tsou, chef de la dynastie des Han (et c’était un de mes ancêtres), parvint à l’empire, disait-il, c’est qu’il savait tendre la main à ceux qui se rendaient, accueillir ceux qui faisaient leur soumission ; pourquoi ne pas l’imiter ? — L’exemple que vous citez s’applique mal à la circonstance présente, répondit Tchu ; le Ciel ne fait pas naître deux fois les mêmes événements ! À la fin du règne du dernier des Tsin, après l’usurpation de Pa-Wang, l’Empire était en proie à l’anarchie ; le peuple ne savait à qui obéir, on devait le gagner par la clémence en accueillant la soumission des vaincus. Mais aujourd’hui, l’Empire n’est pas divisé, les Bonnets-Jaunes sont seuls en révolte ; leur accorder une capitulation, ce n’est pas s’attirer les gens de bien ; c’est laisser tout l’avantage aux brigands, et ouvrir une nouvelle carrière à leurs excès ; tandis que s’ils succombent, ils n’ont plus qu’à déposer les armes ; croyez-moi, c’est une mauvaise idée que d’abonder ainsi dans leur manière de voir. — Prenez-y garde, reprit Hiuen-Té ; nous les tenons cernés dans cette ville comme dans un cercle de fer ; si on rejette leurs propositions ils combattront en désespérés ; rien ne peut résister à dix mille soldats se levant comme un seul homme, et dans ces murs il y en a bien des fois dix mille, résolus à vaincre ou à mourir ! Ne vaut-il pas mieux retirer nos troupes d’un côté de la ville, attaquer par l’autre ? les rebelles abandonneront la place ; le cœur leur manquera pour combattre, et nous pourrons les prendre au passage. »

Ce dernier avis fut adopté ; les assiégeants cessèrent de