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Kuu-Lou, trois frères, Tchang-Kio, Tchang-Liang et Tchang-Pao. L’aîné n’avait fait aucune étude, mais un jour (dit la légende) qu’il cueillait des plantes médicinales sur la montagne, il rencontra un vieillard aux yeux brillants, à la chevelure flottante comme celle d’un jeune homme, appuyé sur un bâton fait d’une tige de la plante ly, qui l’ayant invité à entrer dans une caverne, lui présenta les trois volumes d’un ouvrage de la secte des Tao-Sse, dont le titre était : Recettes magiques et Talismans pour arriver à la grande quiétude. Puis il dit à Tchang-Kio : « Appliquez-vous à l’étude de la doctrine de Lao-Tseu et recevez du Ciel la mission de convertir les hommes ; sauvez par toute la terre la génération présente ; les désirs multipliés et désordonnés du cœur sont la source positive de toutes les afflictions ! » Après s’être fait connaître sous le nom de l’immortel de Nan-Hoa (qui préside aux fleurs dans les régions du Sud), il disparut, emporté par le tourbillon léger d’une brise adoucie. Muni du livre mystérieux, Tchang-Kio l’étudia si bien jour et nuit que bientôt il put commander aux vents et à la pluie ; il prit alors le nom du Tao-Sse de la grande quiétude.

[Année 184 de J.-C] Dans les premiers jours de cette même année, une épidémie terrible étendit ses ravages partout l’Empire[1] ; à l’aide d’une eau sur laquelle il répétait des paroles magiques, Tchang l’illuminé guérissait les malades ; ses prodiges le firent surnommer le très-saint Docteur. Tous les affligés, il les appelait près de lui, et après qu’ils lui avaient avoué leurs fautes, il les ramenait au repentir et les convertissait à la vertu. Bientôt il compta cinq cents disciples, et leur nombre augmenta d’une manière extraordinaire, car il parcourait l’Empire à la manière des ascètes en guérissant sur son chemin. Alors Tchang établit ses adeptes dans trente-six endroits différents ; leurs plus grandes réunions étaient de dix mille, les plus petites de six à sept mille ; et dans chacune de ces écoles, il y avait des maîtres qui semaient, à l’instigation de Tchang, cette prophétie mensongère : « Le ciel gris est mort, le ciel

  1. Dans les tableaux historiques de l’Asie, Klaproth dit que cette peste dura onze ans, de 173 à 184 de J.-C.