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véritable. Les Chinois, qui se cachent si bien chez eux, se trahissent à plaisir dans leurs écrits, et c’est peut-être à cause de cela qu’un édit impérial défend la sortie des livres.

Comme toutes les nations arrivées à un certain raffinement de civilisation, comme celles aussi chez qui le sentiment du passé est plus vif que l’instinct de l’avenir, la nation chinoise a, au plus haut degré, la passion des petites chroniques et de la littérature facile qui lui retracent son histoire sous une forme agréable à saisir. Les peintures répandues à profusion sur les vases, sur les coupes, sur les paravents, sur les éventails, et qui nous semblent tout simplement bizarres ou amusantes, sont, pour ainsi dire, les illustrations des nouvelles, des petits poëmes, des légendes les plus estimés et les plus populaires. Le peuple les comprend et les aime, mieux que chez nous il ne sent les beautés d’un art étranger inutilement exposées sous ses yeux. En Chine, il n’y a donc point entre l’artiste et l’homme de la foule cette barrière (qui n’existait pas non plus chez les Grecs) dont l’effet est d’intercepter les rayons du génie destinés à éclairer le peuple. Pourvu qu’un Chinois connaisse les points principaux de son histoire, soit un peu initié à sa propre littérature, il possède l’intelligence de tout ce que les arts peuvent reproduire autour de lui.

Quant aux ouvrages littéraires, l’imprimerie les a répandus en Chine sous tous les formats ; on y trouve des éditions académiques, impériales, revêtues du Dragon à cinq griffes, des éditions vulgaires faites à Kwang-Tong et à Nan-King, jusqu’à des éditions diamants que l’étudiant de mauvaise foi peut glisser dans sa manche aux