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eunuques ne doivent être employés qu’au service intérieur du palais… Les élever, de même que leurs parents, à des postes qui leur donnent de l’autorité dans le gouvernement, c’est exposer l’état à des troubles, c’est les exposer eux-mêmes, avec leurs familles, à se perdre. N’avons-nous pas des exemples récents des murmures qu’ils ont excités et du désordre qui en est résulté ? Pour prévenir ces maux avant qu’il soit impossible d’y remédier, il est absolument nécessaire de les exterminer tous. C’est le moyen de procurer la paix au peuple, qui sera toujours dans l’inquiétude de retomber sous leur tyrannie et dans la volonté de se révolter pour s’y soustraire. »

L’impératrice répondit que de tout temps il y avait eu des eunuques dans le palais, et s’étonna qu’on voulût changer une si ancienne coutume. Elle ajouta que s’il y avait des eunuques coupables il fallait les punir, mais qu’il n’était pas juste de confondre avec eux ceux qui étaient innocents.

Téou-Wou jugea par cette réponse que l’impératrice ne le seconderait pas ; cependant, comme elle avait dit qu’il fallait faire mourir les coupables, il fit arrêter l’eunuque Kouan-Pa, qui était l’âme de leur cabale, comme ayant le plus de souplesse et de ressource dans l’esprit. Il fit aussi mettre en prison Kou-Kan ; le tribunal des crimes, chargé d’instruire leur procès à tous les deux, les ayant condamnés à mort, la sentence fut exécutée. Téou-Wou voulut faire subir le même sort à l’eunuque Tsao-Tsié, mais l’impératrice refusa d’y consentir. Tchin-Fan lui présenta à cette occasion un placet dans lequel il accusait les eunuques et la nourrice de l’empereur de s’être ligués ensemble pour bouleverser le gouvernement. Il avertissait cette princesse qu’elle avait tout à craindre de leur part, et que, si elle voulait avoir une certitude de ce dont il la prévenait, elle n’avait qu’à rendre public son placet, et qu’il ne doutait pas que tout le monde, même ceux qui approchaient de sa personne, ne lui rendissent témoignage que le seul zèle pour le bien de l’état l’animait, en cherchant à écarter du gouvernement ceux dont une expérience funeste n’avait que trop fait connaître les mauvaises intentions. Liéou-Yu (autre académicien de la famille impériale) présenta aussi un placet dans lequel il exposait les mêmes griefs contre les eunuques et demandait, comme Tchin-Fan, qu’on en fît un exemple. La régente ne voulut jamais abandonner ses favoris aux rigueurs de la justice ni entrer dans le plan de les détruire entièrement. Cependant, peu de temps après, Tchin-Fan et Téou-Wou firent arrêter l’eunuque Tching-Ly, accusé de concussion… Celui-ci, dans ses réponses, chargea ses collègues Tsao-