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service furent bien accueillis et ils restèrent au camp ; ceux qui voulurent retourner dans leurs foyers reçurent des grains en gratification, et, rentrés chacun chez eux, ils continuèrent leurs travaux. Le peuple qui habitait au sud du fleuve Kiang ne tarda pas à accourir au bruit d’une si généreuse conduite, et ainsi s’accrut l’autorité du nouveau chef devenu indépendant.

Sun-Lang alla chercher et amena dans Kio-Ho sa mère, son oncle et ses jeunes frères ; le plus âgé des trois, Sun-Kiuen, fut chargé, avec Tchéou-Tay, de garder la ville de Hiuen-Tching, et Sun-Lang lui-même marcha vers Ou-Kiun, place située au sud, pour s’en emparer. Dans ce temps, elle était occupée par Yen-Pé-Hou, qui se faisait appeler le roi du Ou oriental. Celui-ci, confiant à deux de ses lieutenants, Tchéou-Tay et Wang-Tching, la défense des villes de Ou et de Kia-Hing, envoya son jeune frère Yen-Yu à la tête du pont de Fong-Kiao avec toutes les troupes. Il s’y tenait donc à cheval, le sabre en main, tandis que des éclaireurs venaient dans le camp de Sun avertir leur maître de son approche.

Déjà Sun-Tsé voulait combattre, mais Tchang-Hong mit pied à terre et lui donna quelques avis. « Ce n’était pas à lui qui méditait de si grandes choses, à lui général de trois corps d’armée dont le sort dépendait de sa propre existence, d’aller s’exposer en attaquant un petit chef de rebelles ; il devait songer au grand rôle que lui réservait le ciel, répondre à l’attente de la terre entière, et ne pas alarmer le cœur du peuple en courant un danger inutile. »

« Vos paroles, noble conseiller, dit Sun-Tsé, me pénètrent comme le métal et la pierre ; seulement je crains que les généraux et les soldats soient moins prompts à se dévouer. »

Il ordonna donc à Han-Tang de partir avec sa cavalerie vers le pont, et il y arriva lorsque Tsiang-Kin et Tchen-Wou descendant le fleuve chacun dans un petit bateau, le traversaient en face de ce même point. De là, ils accablèrent de traits l’armée déployée sur le rivage, et tous les deux gravirent le bord à la course, renversant tout sur leur passage, si bien que Yen-Yu recula et s’enfuit battu, avec les siens, jusque dans la ville de